mardi 2 mars 2010

Le (presque) grand amour


Théâtre des Variétés
7, boulevard Montmartre
75002 Paris
Tel : 01 42 33 09 92
Métro : Grands Boulevards

Une comédie de Patrick Hernandez
Avec Sandra Gabriel et Foudik Kaïbou

Ma note : 7/10

L’histoire : Rémy et Nathalie sont tous deux à la recherche du partenaire idéal. Malgré leurs échecs sentimentaux respectifs, ces deux trentenaires continuent de rêver au Grand Amour. Rémy ne se remet pas de sa dernière rupture et cherche désespérément une femme « pas compliquée, qui ne connaîtrait pas la migraine »… Nathalie, quant à elle, rêve du Prince Charmant au cœur tendre qui l’acceptera telle qu’elle est, « heureuse, libre et épanouie ».
C’est ainsi qu’entrent dans la vie de Rémy et Nathalie deux bons génies de l’Amour prêts à exaucer leurs vœux. Cette perfection tant attendue suffira-t-elle à combler nos deux célibataires ?

Mon avis : Ayant pour principe de ne jamais lire un dossier de presse (même pas le résumé de la pièce ou du film) avant de me rendre à un spectacle afin d’avoir l’esprit totalement libéré de tout a priori, j’aime bien découvrir une histoire au fur et à mesure qu’elle se déroule devant mes yeux. Mes réactions étant dès lors spontanées, il m’arrive de passer dans différents états d’esprit en fonction de ce que je ressens. C’est précisément ce qui s’est passé en allant voir Le (presque) grand amour.
La première image que l’on reçoit est celle de Rémy, supporter de foot du PSG en train de voir son équipe gagner ( ?) à la télévision (je sais, c’est une fiction). Echarpe du club, fanion, bière… Tout le folklore est là, dans cette piaule typique de célibataire trentenaire.
Soudain, alors qu’il est en plein orgasme sportif, sa liesse est interrompue par une voix qui vient de l’au-delà. Il s’agit d’une certaine Valentine Cupidon, génie de l’Amour de son état. Rémy ne la voit bien sûr pas, mais nous, spectateurs, si. Nous découvrons une sorte d’ange habillée façon vestale, se balançant mollement sur une balançoire sans doute accrochée à un nuage… VC, qui ne porte pas de lunette, le sonde pour savoir quel est son type de femme idéal, s’engageant même à la lui dénicher et à la faire livrer à domicile. Les premières volontés de notre pauvre célibataire ne sont pas situées dans le domaine intellectuel. Elles vont évidemment se nicher en dessous de la ceinture. Et VC d’énumérer à sa place la liste des fantasmes que tout garçon normalement constitué possède dans son imaginaire. Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’elle appelle un chat… un chat.
C’est là que je me suis dit « Ouh la la, où est-ce que l’on est en train de nous emmener ? » Même si je suis loin d’être prude, je ne prise guère ce qui est trivial.
Et bien, j’ai été très vite rassuré… Si la pièce et ses multiples rebondissements tournent en abondance autour du sexe (voire dedans), il faut reconnaître que ce n’est jamais scabreux, ni même vulgaire. C’est rabelaisien, gaulois, coquin. C’est gentiment adulte, quoi !

Autre élément qui plaide en faveur de cette comédie, elle est bien écrite et elle repose sur une histoire vraiment originale. Mettre en parallèle les deux couples formés par un célibataire en manque et un(e) partenaire parfait(e) en tout point et avoir ainsi les deux versions, masculine et féminine, de ce transport amoureux idyllique, c’est particulièrement savoureux. Comme on s’attache à nos deux personnages, on est bien content de suivre l’évolution de leur toute nouvelle vie de couple. Et puis il y a les interventions le plus souvent désopilantes de nos deux bons génies. Le tout, franchement bien secoué, donne un cocktail plutôt savoureux et très riche en ingrédients divers : utilisation judicieuse du « name dropping » dans des allusions inspirées par l’actualité (Bachelot, Sarko, Hortefeux…), jeux de mots inégaux (mais même les plus éculés passent parce qu’ils tombent pile au bon endroit), citations déformés (« Passer du coca light », « va dans l’ métro Satanas »…), clins d’œil au cinéma (le fameux « Are you talking to me ? » de Robert de Niro…), inversion de rôles (grand moment de drôlerie quand Dulcinée se met dans la peau de Rémy, qui nous fait un peu rire jaune, nous les garçons), sentences qui donnent à réfléchir (« Un homme séducteur et fidèle, même dans la magie ça n’existe pas », « T’est trop parfaite… Finalement, on adore ça les chieuses », « Les femmes mettent la pressions aux hommes »…), parodies (un joli morceau de bravoure inspiré de la tirade des nez), un bel hommage rendu eu théâtre (très applaudi par le public), quelques improvisations fort bien venues, trous de mémoires gérés malicieusement, et même quelques pas de danse … Et la fin nous offre un double rebondissement très malin… Bref, on n’a aucun problème pour se laisser emporter par ce gentil délire totalement assumé par deux comédiens en tout point habités par leurs différents personnages.

Et c’est là le dernier – et non le moindre – élément positif de ce spectacle : le jeu des comédiens. Sandra Gabriel et Foudik Kaïbou, s’en donnent à cœur joie, ne reculant devant aucune audace, qu’elle soit physique ou verbale. Ils possèdent tous deux une excellente maîtrise du burlesque et gèrent avec une réelle gourmandise les situations les plus ridicules. Ils savent habilement distiller les propos les plus lourds avec la plus grande finesse (un grand écart que peu de comédiens sont capables de réaliser en direct). On les sent très joueurs et cet état d’esprit aussi généreux que facétieux, les rendant éminemment sympathique, passe aisément la rampe pour offrir un exquis moment de partage avec le public.
Le (presque) grand amour est le type de pièce que le bouche-à-oreille va inévitablement booster car on s’y amuse beaucoup. Elle mérite amplement d’obtenir un (presque) grand succès.

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