vendredi 23 septembre 2011

Simplement complexe


Comédie de Paris
42, rue Fontaine
75009 Paris
Tel : 01 42 81 00 11
Métro : Blanche

Une comédie de Philippe Elno
Mise en scène par Pierre-François Martin-Laval
Avec Philippe Elno (Christophe), Denis Maréchal (Norbert), Fabienne Galula (Natacha)

Synopsis : Christophe a une vie palpitante… sur internet ! Il y a même rencontré l’amour. Seulement voilà, le « net » est en panne. Et Norbert, technicien chez simplecom.com, ne peut rien faire pour rétablir le contact. Emu par la détresse de son client, il va tout mettre en œuvre pour sortir du virtuel une histoire qui peut vivre et tenter d’aider le destin d’une rencontre sans point com…

Mon avis : J’avais déjà beaucoup aimé L’Abribus la précédente comédie écrite et interprétée par Philippe Elno. Cet homme a un univers très personnel, plein de tendresse, de poésie, de cocasserie aussi et surtout.
Pour moi, Philippe Elno est le fils caché que Pierre Richard aurait eu avec Pierre Etaix. Simplement complexe, c’est Le Distrait qui joue au Soupirant… Mais les temps ont changé. Les fantasmes, le romantisme s’expriment aujourd’hui sur le net. On communique, on se répand, on ose et on tombe amoureux sans se connaître du tout. Chacun peut se construire son double idéal et s’offrir des vies palpitantes par procuration.

C’est le cas de Christophe. A peine sorti de son divorce et installé dans sa nouvelle garçonnière mansardée, qu’il tente de reprendre le lien qu’il a tissé sur la toile avec Natacha. Las, son serveur, Simplecom.com, n’a pas enregistré son changement d’adresse. Et le pauvre est déconnecté de son irréalité. Après avoir tenté en vain de résoudre son problème par téléphone, c’est l’irruption de Norbert, un technicien en chair et en os qui va bouleverser ses plans les plus intimes.
Cette comédie ne cesse de monter en puissance au fur et à mesure que le plateau se peuple. C’est facile, on peut la diviser en trois parties : 1/ Christophe se débat dans un entretien kafkaïen avec les gens de Simplecom.com. 2/ Norbert tape l’incruste, se prend d’affection pour son client et prend carrément les choses en main. 3/ Natacha fait son apparition…
La situation est banale, toute simple. Christophe, Norbert et Natacha sont des gens comme nous, emberlificotés dans leur quotidien, dans leur petite vie chafouine. Ils sont tous les trois un peu paumés. Leur association va alors décanter la crise qu’ils vivaient sans trop en avoir conscience. Chacun va être un révélateur pour l’autre. Il y a beaucoup d’humanité dans cette pièce. On s’attache à nos trois antihéros, si gauches, si peu armés, si fragiles. Christophe le doux rêveur, et le pragmatique Norbert, vont se sentir soudain plus forts grâce à l’autre. Le duo fonctionne admirablement.

S’il fonctionne si bien, c’est par la grâce des comédiens. Pour jouer des gens aussi quelconques, il faut à la fois faire preuve de beaucoup de recul et de subtilité. Ils ne tombent jamais dans la caricature. Confondants de naturel, ils existent réellement. On s’attache tout de suite à eux tant ils sont sympathiques et touchants.
Philippe Elno et Denis Maréchal se livrent à un superbe numéro de duettistes qui n’est pas sans rappeler les meilleurs tandems du grand écran. Sauf que là, ce sont deux losers qui unissent leur vulnérabilité. Ils sont justes, ils n’en rajoutent pas pour faire des effets. Tout repose sur l’efficacité d’un texte truffé de bonnes répliques… Et puis il y a Fabienne Galula. Avec sa voix pointue, son manque d’assurance, ses gestes empruntés, sa candeur et son franc-parler involontaire, elle se met illico au diapason de ses deux partenaires. Et on se sent bien en compagnie de ces trois paumés en mal d’amour. Nous sommes entre gens normaux.
Simplement complexe est une des belles et bonnes surprises de cette rentrée pourtant très chargée. C’est frais, c’est poétique, c’est naturellement drôle. On sort avec la banane de la Comédie de Paris.
Enfin, si cette comédie est particulièrement réussie, la mise en scène de Pierre-François Martin-Laval (le PEF des Robins des Bois) y est pour beaucoup. Il faut dire que son univers est très proche de celui de Philippe Elno. Ces deux là parlent le même langage et cela se ressent.

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