jeudi 15 novembre 2012

Fabrice Di Falco


Di Falco Quartet

Lundi soir, dans l’auditorium de l’Espace Georges Bernanos, J’ai eu le bonheur de découvrir un véritable phénomène : Fabrice Di Falco.
Ce jeune homme, dont quelques relations m’avaient déjà parlé, est surnommé à juste titre « Le Farinelli créole ». Il est un des ares chanteurs au monde (ils ne sont paraît-il qu’une vingtaine) à posséder une tessiture de sopraniste et de haute-contre. Si bien qu’il peut aussi bien interpréter ces airs qui étaient l’apanage des castrats aux 16è et 17è siècles que de jouer avec le grain grave de sa voix. Cette particularité l’autorise à aborder un répertoire on ne peut plus éclectique, passant avec une aisance déconcertante du baroque au jazz, de l’opéra à la comédie musicale.

Le 12 novembre dernier, j’ai donc pu le découvrir dans une nouvelle formule, le Di Falco Quartet.
Il nous offre une étrange entrée en scène, très théâtralisée. Pendant que les musiciens jouent, il apparaît en haut des travées, revêtu d’une longue chasuble noire, le visage dissimulé derrière un loup vénitien surmonté de plumes de paon. Il descend lentement les marches qui conduisent à la scène et, soudain, sa voix, éthérée, cristalline, mélodieuse, emplit l’espace. Il se déplace au ralenti, hiératique, jubilant sans doute intérieurement de l’effet qu’il produit sur les personnes qui le découvrent. Sur un rythme jazzy, il se livre à quelques vocalises étonnantes…
Mais, dès le deuxième morceau, il se démasque, au propre comme au figuré. Ayant jeté sa soutane aux orties, il quitte résolument son personnage quelque peu irréel. Juché sur une haute chaise tapissée de tissu antillais, il se présente avec énormément d’humour et de distance. En préambule à un air de Vivaldi, à la fois informatif et facétieux, il raconte le phénomène des castrats.
Son show – car c’en est un – est original, riche et varié. Accompagné par de formidables musiciens (Jean Rondeau au piano, Aurélien Pasquet à la batterie et Erwan Ricordeau à la contrebasse), bénéficiant de l’excellente acoustique de l’auditorium, il chante du Mozart, rend hommage au Chevalier de Saint-George, Antillais comme lui, dialogue avec la contrebasse, campe un duo dans lequel, jouant à merveille de son incroyable tessiture, il se répond à lui-même en tenant à la fois le rôle féminin et le masculin, se livre à une danse lascive et romantique avec une danseuse et termine son spectacle par une surprenante version de Adieu foulard, adieu madras, un chant traditionnel martiniquais datant de 1769 qu’avait popularisé… Chantal Goya !

Fabrice Di Falco est un personnage hors normes. Alors qu’il est invité à se produire partout dans le monde, il reste étonnant de simplicité. Il ne s’enferme pas dans son statut de phénomène vocal. Protégé par son sens de l’humour, il est accessible et adore papoter avec le public à l’issue de sa performance (dans le sens anglo-saxon du terme). En plus de ses prodigieuses qualités vocales, il est incontestablement une belle âme.
Si vous ne le connaissiez pas, retenez bien son nom et guettez ses prochaines prestations car il n’a pas fini de nous surprendre et de nous enchanter.

Aucun commentaire: