mercredi 10 juillet 2013

Une envie folle

Comédie de Paris
42, rue Pierre Fontaine
75009 Paris
Tel : 01 42 81 00 11
Métro : Blanche / Pigalle

Une comédie de Fabrice Blind, Michel Delgado, Nelly Marre et Carole Fonfria
Mise en scène par Romain Thunin
Décors de Juliette Azzopardi
Costumes de Régina Gothe
Musiques de Maxime Richelme
Avec Fabrice Blind (Quentin), Cédric Clodic (Jean), Ambre Ferrante (Juliette)

L’histoire : Avoir un enfant, c’est déjà pas facile, mais quand on s’y met à trois, ça l’est encore moins !
Une future maman sortie tout droit d’Internet, un présentateur météo à l’ouest, un flic jaloux…

Mon avis : Le titre est suffisamment explicite, cette comédie s’inscrit judicieusement dans l’air du temps. Si l’intrigue nous semble simpliste dans sa première moitié, elle se révèle bien plus tordue par la suite. Même si on se doute, dès le début, que la jeune femme qui se fait appeler Juliette n’est pas vraiment l’oie blanche pour laquelle elle essaie de se faire passer…

Le fait qu’ils se soient mis à quatre – deux filles et deux garçons – pour la concevoir est un gage de rigueur. On voit qu’ils ont été très attentifs à ce que la pièce soit d’une part très rythmée et, d’autre part, écrite au cordeau. Les caractères, les profils psychologiques des deux garçons, Jean et Quentin, sont fort bien dessinés. Et les dialogues sont particulièrement aiguisés. Les auteurs ont tellement voulu que chaque réplique fasse mouche qu’ils sont parfois tombés dans un péché de gourmandise. Si bien qu’on a droit à quelques facilités et à une dizaine de saillies superfétatoires. De même que, pour pouvoir faire rire à tout prix, ils ont baissé la garde de la rigueur pour introduire une ou deux scènes que j’ai jugées trop caricaturales (le karaoké de Jean par exemple).

Mais, trêve de pinailleries, en passant outre ces petites scories qu’il suffirait de gommer pour que la pièce gagne encore en efficacité, Une envie folle nous fait passer un excellent moment. Par ses dialogues, ainsi que je l’ai souligné, mais également grâce à la qualité de jeu de ses acteurs. S’appuyant sur des personnalités bien définies, Quentin et Jean peuvent s’en donner à cœur joie. Autant Jean est d’une nature méfiante, scrupuleuse, angoissée, autant Quentin est cool, conciliant, insouciant. Il n’y a que dans les affres de la jalousie qu’ils se rejoignent ce qui donne lieu à des scènes à la fois amusantes et réalistes (et qui concernent les couples de tous les sexes). Chacun s’en tenant à son cahier des charges (l’Auguste et le clown blanc), ils apportent jusqu’au bout de la pièce une grande crédibilité à leurs personnages. Ce qui a pour effet de renforcer les effets comiques.


Dans le rôle de Quentin, Fabrice Blind est absolument épatant. Ce n’est certes pas nouveau, mais c’est à chaque fois un réel bonheur, il possède une grosse présence comique. Toujours juste, il n’a pas besoin d’en faire des tonnes pour nous faire rire… Avec le personnage de Jean, Cédric Clodic a hérité du rôle le plus « ingrat » car le plus sérieux. Avec ses réserves permanentes, ses émois de rosière, droit dans ses bottes et dans ses préférences sexuelles, il est l’empêcheur de pouponner en rond. Il est le contrepoint parfait de son partenaire… Enfin, et c’est là aussi une des grandes qualités de cette pièce, il n’y a que leur envie d’enfant qui soit « folle » car ils ne tombent jamais dans le cliché rose bonbon, théâtral et maniéré du couple d’homos. Ils forment une association de huit ans d’âge comme les autres, qui se chamaille constamment et qui s’aime énormément…


Et puis il y a Ambre Ferrante ; Ambre et sa part d’ombre. Qui est vraiment Juliette ? Est-elle sincère ? Est-elle une intrigante ? Est-elle paumée ? Est-elle aussi nunuche qu’elle le paraît ? En tout cas, sa plastique idéale rend tout à fait plausible le fait qu’un homo puisse re-virer sa cuti pour avoir envie de l’honorer… Son rôle exige beaucoup de finesse et de nuances car, par la mystère qui l’entoure, elle est le pivot de l’intrigue. Elle ne fait que monter en puissance tout au long de la pièce.
Bref, les trois rôles sont impeccablement équilibrés, ils s’emboîtent sans aucune fausse note.

Cette pièce, drôle et sensée, pourrait être un des rafraîchissements de cet été. J’ai comme « une envie folle » de vous la recommander…

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