mardi 14 juin 2016

Emma Daumas "Vivante"

Abacaba / Musicast


Vivante ! Oui, Emma Daumas aurait pu ajouter un point d’exclamation au titre de son nouvel album EP de six titres car on peut entendre ce mot comme un cri. Cri de bonheur ? Cri de soulagement ? C’est sans doute un peu de tout ça. Je n’irai pas jusqu’à y voir un parallèle avec Le Bulletin de santé de Georges Brassens mais, en revanche, il se rapproche assurément du Toujours debout de Renaud.

Demi-finaliste de la Star Academy en 2002, Emma Daumas a connu un joli succès avec son premier CD, Le Saut de l’ange, en 2004. Un « Saut » victorieux puisqu’il sera auréolé d’un Disque d’or. Démarrée sous les meilleurs auspices, la suite de sa carrière sera hélas moins mirobolante. Pourtant, la qualité de ses deux albums suivants n’est pas à mettre en cause. En dépit d’éminentes collaborations, elle subit les Effets secondaires d’une conjoncture défavorable et se trouve amenée par sa maison de disques, Universal, à reprendre Le chemin de la maison
Nous sommes en 2010. Emma, déçue par Les promesses en l’air qu’on lui a faites, ne se décourage pas pour autant. Elle aime écrire et composer. C’est dans son ADN. Elle participe à de nombreuses aventures musicales, tant personnelles que collectives comme, entre autres deux livres-disques pour enfants.
2016 va être doublement l’année de sa re-naissance. D’abord avec la parution en avril de son premier roman, Supernova et, enfin, avec la sortie fin mai de son EP au titre si explicite : Vivante.

Emma Daumas vit dans Le présent. Rien ne sert de ressasser le passé. Sa première chanson exprime tout en douceur et romantisme (un romantisme souligné par des cordes majestueuses) son état d’esprit par rapport à l’amour. Cette tendre mise au point est assez ambigüe car son « présent » exhale des effluves de passé tout en exprimant une réelle inquiétude sur l’inconnu que représente l’avenir. Finalement, sa conclusion est empreinte de sagesse : soyons positif et vivons « le présent » avec le plus d’intensité possible.

En dépit de ces bonnes résolutions, l’amour reste fragile et il arrive fréquemment qu’il se « déchiquète » à un moment ou à un autre. Ça peut arriver par exemple à 14 heures du matin. J’aime beaucoup cette chanson. J’en apprécie le ton empreint de fatalisme et dénué de toute animosité… Cette chanson est en fait en trois parties. Après le constat d’échec, elle se réfugie dans la réminiscence des bons moments du passé. C’était tellement bon que la chanson en devient presque joyeuse… Et puis, retour à la réalité avec une ultime phrase qui laisse la porte entrouverte… Très jolie écriture et, surtout, interprétation rendue encore plus sensible par une voix très devant et la présence des cordes.


Jolie mélodie légère et entraînante. Comme son titre laisse à le présupposer, l’atmosphère des Promesses en l’air est aérienne. On a l’impression que chacune des chansons peut s’emboîter avec les autres façon gigogne. Elles sont en effet toutes reliées par le fil rouge de la relation sentimentale. Celle-ci est une tendre analyse comportementale, constatée de façon réaliste mais exprimée et jugée avec bienveillance. Histoire de dire qu’elle n’est dupe de rien mais qu’elle est prête à s’en amuser. Superbe chanson pleine d’humour et d’amour.

Emma Daumas retrouve quelques minutes ses rêves de petite fille pour évoquer Ce que veulent les princesses. Chanson pleine de fraîcheur et de nostalgie. Et puis les petites filles grandissent et les rêves, confrontés à la réalité, se teintent un peu moins de candeur et de naïveté. Tout cela est raconté en fanfare (superbes cuivres), ce qui permet de rester quand même dans la légèreté… et dans l’espoir. Très, très jolie chanson tant dans l’interprétation volontairement détachée que dans son traitement musical.

Le vieux saule est une chanson mélancolico-bucolique qui m’a fait un peu penser à Brassens avec son Au pied de mon arbre. Ode à la nature et au temps qui passe. S’allonger et penser, rêver et « prendre la peine de regarder les arbres ». Chanson contemplative au climat empreint de douceur.

Une guitare sobre puis un accordéon discret soulignent cette tendre déclaration d’amour et d’allégeance envers celui qu’elle appelle tout simplement Mon homme. La voix, très devant, se fait mélodieuse et insistante. Superbe invitation à un échange harmonieux. Quelle interprétation et quelle intensité ! Magnifique…

Vivante est un album délicieusement féminin. Sensible, intimiste, plein de poésie et de lucidité à la fois. La voix d’Emma Daumas, intense et délicate, vous happe et vous touche dans les endroits les plus douillets. La fragilité est dite et même revendiquée. Et puis, il faut également souligner ses grandes qualités d’écriture ; une écriture qui peut parfois s’apparenter à de la peinture. J’ai beaucoup, beaucoup aimé.

Gilbert « Critikator »Jouin


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